Pénurie de profils, quête de sens des juristes… Comment les directeurs juridiques peuvent-ils attirer la perle rare ?

Que constatez-vous comme tendances sur le marché du recrutement juridique en ce début d’année ?

D’après le sondage posté sur Linked In la semaine dernière auprès de mes abonnés,* la tendance RH la plus importante dans le recrutement juridique pour 2023 est la quête de sens recherchée par les juristes (43%). Vient ensuite la pénurie de candidat (32%) et le fait que les directeurs juridiques souhaitent désormais faire partie du Comex dès l’embauche (18 %).

Sur la quête de sens, que conseillez-vous aux directeurs juridiques pour attirer la perle rare ?

Je leur recommande de motiver les candidats en mettant en avant les valeurs de l’entreprise, la RSE, l’intérêt du poste, les évolutions possibles à moyens et longs termes etc. Travaillez l’image de votre entreprise et de votre direction juridique, notamment sur les réseaux sociaux !

Désormais, c’est aux directeurs juridiques d’expliquer en quoi le poste proposé est intéressant et pourquoi le candidat doit rejoindre LEUR entreprise plutôt qu’une autre.

Par rapport à l’an dernier, vous avez constaté une pénurie de candidats…

Oui très clairement, les profils juridiques sont en forte tension. Depuis le Covid, les besoins de juristes ne cessent d’augmenter. Une forte demande qui n’existait pas il y a une dizaine d’années, qui s’explique par une hausse des demandes de juristes. On constate également un manque d’adéquation entre le profil des candidats et la demande sur le marché. Par exemple, aujourd’hui, en tant que chasseur de têtes, j’ai peu de mandat pour des postes de juristes en PI alors les candidats sont nombreux. 

Au contraire, il y a d’autres domaines où la demande est forte et la pénurie de candidats rend les recrutements plus complexes. Par exemple, les juristes en droit social, en droit immobilier ou en corporate…

Pour faire face à cette pénurie, les entreprises vont chercher à gagner du temps pour sortir d’une impasse. Elles peuvent également chercher des solutions temporaires, par exemple, le management de transition, qui peut apporter de la souplesse.

Comment l’expliquez-vous ?

Il faut garder à l’esprit qu’il n’y a pas de désamour pour les métiers du droit, ce serait un raccourci qu’on ne peut pas faire. Dans le corporate, il y a peut-être un lien à faire avec la quête de sens : le rythme de vie des cabinets d’affaires peut en freiner certains. Aujourd’hui, les candidats ne sont plus en quête de salaire uniquement mais également en recherche d’un équilibre vie professionnelle-vie personnelle.

Quels conseils donneriez-vous à un directeur juridique qui recrute actuellement ?

Déjà, acceptez de ne plus prendre forcément des candidats « copy and paste » : ceux qui ont déjà réalisé les missions du poste et qui viennent du même secteur que celui recherché.

Acceptez des profils qui n’ont pas forcément fait et ceux qui viennent de secteurs différents. Élargissez vos critères de recherches. C’est une richesse d’intégrer des profils atypiques et diversifiés au sein de votre direction juridique.

Acceptez que les délais pour une recherche soient plus longs.

Les candidats sont-ils plus exigeants en termes de rémunération ?

Je parlerais d’un « réajustement » des salaires des juristes. De façon générale, ils étaient moins bien payés que les autres professions, comme par exemple les financiers.

Aujourd’hui, je conseille à mes clients de viser un « prix juste » et de ne pas faire échouer un recrutement pour une négociation de 1 ou 2 K.

Côté candidats, soyez réaliste et pensez moyen / long terme. Arriver à un niveau de rémunération en décalage avec le marché risque de vous mettre en difficulté par la suite pour une évolution.

Si le process de recrutement est trop long, il y a un risque que le candidat aille voir ailleurs. Que conseillez-vous ? 

Les candidats ont souvent plusieurs processus de recrutement en même temps alors il faut que les étapes de recrutement soient claires. Si possible, raccourcissez les délais entre les entretiens avec le manager, le DRH, etc. S’il est important pour l’entreprise de réaliser plusieurs entretiens avec différents interlocuteurs, n’attendez pas 3 semaines entre chaque entretien.  

La dernière tendance de votre sondage concerne les directeurs juridiques qui refusent un poste s’il n’est pas membre du Comex. Qu’en pensez-vous ?

C’est un sujet lié à la gouvernance et à l’impact du directeur juridique au sein de l’entreprise. Pour être influents, certains candidats refusent des postes s’ils ne sont pas rattachés au DG ou s’ils ne sont pas membres du Comex. Le rattachement au DAF peut poser problème. C’est un sujet à travailler avec les RH et le top management.

Autre solution de compromis : il est peut-être possible de faire partie d’un comex élargi pour avoir un pied dans la porte. N’hésitez pas à faire remonter le sujet et à négocier ce rattachement hiérarchique. 

*Le sondage a recueilli en une semaine 217 votes.